6 ans qu'on l'attendait et le voilà, enfin ! Memento Mori...ou comment la pandémie de Covid a tout cassé.
On connaissait le style James Ford : des rythmiques lourdes et agressives pour masquer la faiblesse des arrangements - en même temps, c'est un batteur, qu'est-ce qu'il y connaît en musique ?!
- et qui faisait de Spirit un album à première vue bien ficelé mais au final très pauvre sous le vernis dont il était recouvert, vide et artificiel en termes de production.
Avec MM, on prend les mêmes et on recommence ! Mêmes causes, mêmes conséquences... à la différence près que ce qui sauvait Spirit, la qualité relative des compositions, est complètement absent ou presque sur MM. Sans toucher au sublime, on arrivait quand même avec Spirit à trouver du plaisir à se passer l’album ; il m'arrive parfois de l'écouter et certains titres fonctionnent encore bien. Mais ce qui frappe dans MM c'est la faiblesse des compositions. Hormis quelques titres qui émergent, ceux de Dave notamment, la majeure partie des morceaux me fait l'effet d'un long et pénible chemin de croix, linéaire au possible, et dont les fins, plus abruptes les unes que les autres, nous renvoient irrémédiablement à l'idée qu’il a dû être très pénible pour eux d'arriver au bout de chaque morceau et que le cœur n’y était peut-être pas.
Alors c’est un album de riches évidemment, avec des moyens donc, du temps et du savoir-faire… et ça s’entend, dans la production des sons et le mixage notamment, mais quel ennui ! Je me suis surpris à me demander plusieurs fois quand cela allait s'arrêter.
J'aime Depeche Mode, mais pour paraphraser le chroniqueur de Classic21 (radio belge pourtant à la pointe en ce qui concerne la promotion du groupe), dont on sentait qu'il voulait absolument dire du bien sans pour autant parvenir à trouver quoi que ce soit de positif à dire, il manque quelque chose.
Il a bien sûr évoqué la perte de Fletch pour expliquer cela. Il est évident que ce qui fonctionne à 3 ne fonctionne plus forcément à 2, ça tombe sous le sens, mais est-ce la seule raison ?
My Cosmos Is Mine est un des titres que je sauverais sur cet album. Sans être extraordinaire, il ouvre bien l'album et le relatif manque de substance lui va bien. C'est un titre minimaliste qui se satisfait de peu d'arrangements, un peu comme un In Chains en son temps. Si ce n'est la fin un peu longuette et manifestement pas très inspirée, ça passe. Après une ouverture aussi dark et intense, on était en droit de s'attendre à un disque tout aussi dark et profond, aux ambiances fouillées, du DM comme on aime quoi !
L'intro très prometteuse de
Wagging Tongue nous fait donc entrer de plain-pied dans l'album qui du coup devient plus lumineux mais dont le propos reste grave. A la fin des 2 couplets, dont les répétitions "Watch another angel die" manquent quand même un peu de rythme, on s'attend à une sorte d'explosion, un passage au niveau supérieur, et là, patatras ! La douche froide ! Coïtus interruptus ! Pourquoi diable ne pas avoir mis de refrain dans cette chanson ? Tout y était pour en faire un classique et puis non. Au lieu de ça, un pont musical, sans doute issu des improvisations de Gordeno, qui nous emmène vers un troisième couplet, identique aux 2 premiers, sans surprise, sans joie, sans gloire. Il y avait franchement mieux à faire là-dessus. A leur décharge, composer à deux ne doit pas être simple surtout quand il s'agit de deux personnes qui ne sont pas habituées à se parler. Dommage !
Ghosts Again, on connaît. Evident, facile, ça déroule ! Du "major chord" bien réalisé mais comme dirait Alan, ça s'en va aussi vite que c'est venu ! Le fait qu'ils aient choisi ce titre en premier single montre bien la faiblesse du reste d'ailleurs. Jamais ils n'auraient choisi quelque chose de si pop comme premier single s'il y avait eu de la matière derrière. Bref ! Ma fille de 9 ans adore. C’est déjà ça !
Don’t Say You Love Me : Alors ce titre, c'est quelque chose ! Avec le Sometimes de Caroline, on est carrément dans l'auto-parodie
Guitare goresque (je n’ai pas dit grotesque !) entendue 100 fois ailleurs, mais sinon le morceau passe bien. Un bon groove, la voix de Dave, comme sur tout l'album d'ailleurs, est excellente, maîtrisée. Un bon point ! Fin très abrupte malgré tout, service minimum assuré !
My Favourite Stranger : On sent bien ce qu'ils veulent faire depuis ST/RN et SML, mais qu'ils arrêtent. Même recette, ligne de basse extatique, rythme soutenu (ce son de Tom étouffé m'agace au plus haut point), mais n'est pas Joy Division qui veut. Pas de refrain encore une fois pour un morceau plat et linéaire sans envergure et sans âme. On était en droit de s'attendre à un climax à un moment donné, un point culminant, mais le pont musical répétitif et trop long ne remplit pas ce rôle non plus. Dommage !
Soul With Me : Déjà à l'intro, qui ne colle pas du tout avec le reste du morceau, on pense à la collection de synthés vintage de Martin et on se dit que Depeche Mode redécouvre les synthés, en use et en abuse, la touche Vince Clarke en moins effectivement. On ne cherche plus LE son, on incorpore par ci par là des vieux sons pour faire style. Belle démonstration des possibilités quasi infinies d'un tel produit mesdames et messieurs !! Un OVNI sur cet album dont on cherche encore le lien avec les autres morceaux. Le bon moment pour passer au bar à n'en pas douter. Martin Gore en crooner, on n'avait pas besoin de ça ! Quant au petit gimmick de fin de couplet, il est presque comique. Wrong ! (pour ceux qui ont la ref)
Caroline’s Monkey : L'apogée du vintagisme façon MM avec ces sons inutiles et agaçants tout au long du morceau. Nostalgique d'Alan, certes, je constate quand même qu'à cette époque, tous les sons utilisés avaient un sens et une finalité. Ici, ce n'est qu'habillage et remplissage. Quelque chose cependant est présent dans ce morceau, un vrai potentiel (le refrain, hormis le "Sometimes" de Clean, est plutôt bien senti) mais il ne semble pas avoir été exploité totalement et il s'avère assez linéaire et répétitif au final, comme tout sur cet album d'ailleurs. Dommage !
Et encore une fois, à la fin, plouf ! Circulez, y a rien à voir !
Before We Drown : Arrivé là, d’habitude, ma patience étant déjà bien entamée, je me dis que ce MM est un pétard mouillé, que l’étincelle tant attendue ne viendra jamais et que cet album va rejoindre ses aînés dans l’histoire plus tôt que prévu. Avec le recul, et une écoute supplémentaire en faisant autre chose pendant la première moitié, il me semble cependant que la seconde partie de l’album n’est quand même pas trop mal. Pour une fin d’album, je veux dire. Le problème est qu’on sort bien d’un album dans lequel on n’est jamais véritablement entré. La première partie selon moi rate clairement la cible : pas de titre fort, aucune cohérence et WT, MFS, SWM et même CM ne font pas le job. Peut-être qu’en mixant le début de Spirit avec la fin de Memento Mori, on aurait un beau témoignage de l’ère Ford !
Mention spéciale en tout cas pour BWD !
People Are Good est un des morceaux les plus réussis de l'album avec malheureusement un coté Peace dans le break autour des 3 minutes qui l'empêche de réellement atteindre son but et de décoller. Après ça, la fin devient superflue et répétitive. Il n'aurait cependant pas fait tâche sur un Delta ou un Spirit, avec sa pointe d'humour et d'ironie assez sympa.
Always You est un titre qui pour moi n'apporte pas grand-chose musicalement, mais qui relève un peu le niveau général quand même. Il est passé à la radio juste après la chronique sur Classic 21 dont je parlais tout à l'heure et il faut bien avouer que dans le paysage musical actuel, ce morceau est relativement dispensable et inoffensif, surtout avec son petit côté kitsch rétro du début.
Avec
Never Let Me Go, on se rapproche un peu de l'esprit Joy Division dont je parlais tout à l'heure et c'est peut-être la chanson la plus réussie de l'album. Un single potentiel, même si, GA exceptée, je ne verrais aucun de ces titres passer en radio par exemple.
Speak To Me quant à lui est un Cover Me bis. Rien de nouveau sous le soleil donc, mais ça marche. A la fin, c’est quand même assez brutal et on reste un peu sur sa faim.
Quitte à faire un album sur la pandémie, j’aurais préféré qu’ils explorent un peu plus le côté espoir et remise en question que la pandémie a pu faire naître chez certaines personnes, mais à leur âge, j’imagine qu’on craint plus la fin du voyage qu’on ne s’occupe de sa qualité. De plus, autant l’élan contestataire de Spirit avait redonné un second souffle aux compos de Martin Gore, autant ici la source semble s'être tarie. Espérons que les concerts nous apportent plus de joie et d’émotion que cet album inutile !
Désolé pour la longueur et le cassage d’ambiance, mais la déception est à la hauteur de l’amour et du respect que j’ai pour ce groupe. Difficile donc de faire court !